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Choisir le congé parental, dilemme des parents

Pour la rentrée parlementaire de 2023, un nouveau projet de loi est prévu pour une réforme du congé parental « pour  que ce soit en proportion du salaire » selon la ministre chargée des Solidarités et des Familles. L’intention est de répondre aux besoins des parents, Mme Aurore Bergé propose d’augmenter l’indemnisation tout en réduisant la durée du congé parental.  

Mais est-ce que le vécu des parents est aligné sur cette réforme à venir ? Comment les parents s’organisent les premiers mois pour accueillir leurs enfants à naître et à concilier vie professionnelle et vie de famille ? Quels sont les arbitrages pris en compte par les parents sur cette période critique du développement de l’enfant et de l’organisation familiale ?

Nous avons creusé le sujet sur le média de The helpr. Retrouvez l’analyse de ces choix qui impactent carrière et bien-être des parents et des enfants dans la durée.

Selon YouGov pour le HuffPost, la réflexion n’est pas bien accueillie par les Français. En effet, plus de la moitié des parents interrogés se sont montrés défavorables à cette proposition : 45 % se montrent réticents face à l’idée d’un congé parental plus court, mais mieux indemnisé. Ce sondage souligne que 53 % des femmes ne sont pas en accord avec cette proposition, contre seulement 27 % en sa faveur. 

Le congé parental est un droit RH pour tout actif salarié. Il est dédié aux parents salariés, ayant au moins un enfant de moins de trois ans, et pouvant justifier d’au moins un an d’ancienneté. Il permet, à ceux qui le souhaitent, de réduire leur temps de travail ou de le cesser jusqu’à un an avec la possibilité de le renouveler sous conditions. 

En outre, le salaire est directement impacté durant cette période (jusqu’à la suspension). Les parents bénéficient d’allocations, sous certaines conditions. 

À l’heure actuelle et depuis 2015 déjà, le congé parental n’est pas perçu comme suffisamment rémunérateur. 

Selon une étude de l’observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) réalisée en 2015, 1% seulement des pères ont sollicité ce dispositif, contre près de 14% des mères. 

Ces chiffres, très bas, s’expliquent en grande partie par la modeste compensation, qui représente pour de nombreux parents une diminution substantielle de leurs revenus. Le montant de cette indemnisation est proportionnel à la réduction du temps de travail décidée. »

Les attentes de la Réforme : Entre optimisme et réalisme

Au premier avril 2023, l’indemnisation mensuelle la plus élevée, proposée par la CAF, est de 428,71€. 

Dans ce contexte pénalisant, Élodie, maman, témoigne sur son vécu : “J’ai choisi de prendre un petit congé parental, car il était impensable pour moi de laisser ma fille à 2 mois et demi ! Je l’avais réfléchi pendant ma grossesse et prévu de mettre un peu de sous de côté pour y faire face. Car bon, 397€ ce n’est clairement pas suffisant ! Mais j’aurais aimé pouvoir en profiter malgré tout.” 

Reste qu’en dépit de cette dure réalité, certains parents, font le choix – humain – de rester auprès de leurs enfants en bas âge autant que leurs finances le permettent.

Selon l’enquête Travail et parentalité (The Boson Project, The Helpr, 1,2,3 kiD, 2023) les actifs parents sont clairs sur le moment le plus urgent pour résoudre leur défi de conciliation  « À quel moment les parents ont le plus besoin d’aide ? » : 

    • pour 39% :  A la routine au travail en étant parent  
    • Pour 22% : Au retour au travail
    • Pour 8% : Au congé maternité / paternité 
    • Pour 6% : Au congé parental

Élodie continue : “On sait que l’attachement durant les premiers mois et même après, conditionne l’état émotionnel, mais aussi l’estime de soi, la confiance de l’enfant, cela joue sur son développement, et finalement la loi n’en tient pas vraiment compte. On dirait que l’on pense plus à la productivité qu’au bien-être de la mère salariée et de son enfant (même si je peux comprendre que cela doit être compliqué côté employeur).

Et après, entre en jeu aussi le mode de garde et la date à laquelle soit l’institution, soit l’assistante maternelle est disponible.”

Florian, père, 36 ans, conseiller mobilité internationale et podcasteur “Papas Poules”, a opté pour un congé parental à temps partiel. Il partage comment cette décision a été mûrement réfléchie, malgré les défis financiers : “Je suis actuellement en congé parental à temps partiel. Je ne bosse pas les mercredis. Après discussion avec ma compagne, j’ai décidé de prendre un congé parental à temps partiel qui me permet de travailler à 80% et donc d’être aux côtés de mes enfants chaque mercredi. Ça ne s’est pas fait d’un claquement de doigts et nous avons dû peser le pour et le contre, notamment sur la question financière. Et même si cela nous amène à mieux contrôler nos dépenses, j’ai finalement décidé de franchir le pas et j’aurais clairement regretté de ne pas l’avoir fait. Cette possibilité est une chance. Personnellement, cela me permet de passer plus de moments de qualité avec mes enfants, de partager, de jouer, d’apprendre toujours de nouvelles choses. Ils grandissent et me font grandir.” 

La démarche de ce podcasteur engagé sur la parentalité, démontre les difficultés auxquelles de nombreux parents sont confrontés pour concilier vie professionnelle et vie familiale, notamment en raison de la durée et de la rémunération limitées du congé actuel. 

Et puis, Clara, mère de deux enfants, nous a ouvert son cœur : “C’est important pour les enfants et pour les mères tant sur le plan physique que moral. J’ai pris 3 mois de plus que le congé maternité et ensuite, j’ai pu travailler à 80% mais au bout d’un an cela n’était plus possible financièrement.

Il y a pourtant une pression énorme de reprendre et reprendre vite alors que l’épuisement est à son pic. Mon deuxième enfant dormait très peu.”

Barbara, mère d’un enfant de deux ans, explique qu’entre un déménagement du nord de la France vers l’Île-de-France, un changement d’employeur, elle a gardé son enfant jusqu’à son entrée à l’école par manque de solutions de garde. Pas de crèches disponibles à plein temps. Pis, elle est dans les faits en congé parental, mais n’a jamais utilisé le dispositif en tant que tel.

“Je ne savais pas que cela existait”. Comme 52% des parents interrogés dans l’enquête Travail et parentalité (2023,The Helpr, 1,2,3kiD, The Boson Project) elle n’était pas suffisamment informée des différents dispositifs et de leurs droits en tant que parent. “Je pense en prendre un autre si j’ai un autre enfant, mais moins long.”

Quelle stratégie pour rehausser l’attrait du congé parental, spécialement pour les pères ? 

Octroyée à la suite du congé maternel ou paternel, cette parenthèse d’une année, potentiellement prolongeable jusqu’au troisième anniversaire de l’enfant, a vu son engouement s’atténuer depuis une révision en 2015 visant à stimuler la participation masculine. Les bénéficiaires de la Prestation Partagée d’Éducation de l’Enfant ont considérablement diminué, chutant de 480 000 à 265 000 en 2019, d’après les dires du secrétaire d’État dédié à l’enfance et aux familles, Monsieur Adrien Taquet.

premiers jours de vie de l’enfant

Perspectives sur le Nouveau Modèle de Congé Parental

Florian continue de partager son vécu de papa  : “En revanche, dire que c’est tous les jours facile serait faux. La paternité, conjuguée à la vie de couple et au travail, est un défi quotidien ! Mais ça reste le plus beau défi de ma carrière évidemment. Quand j’ai appris que Madame la ministre des Solidarités et des familles travaille sur un projet de congé parental plus court, mais mieux rémunéré, je me suis vraiment dit que ça serait faire un pas en arrière”. 

Pourquoi ? Tout simplement parce que l’importance des 1000 premiers jours de vie de l’enfant est aujourd’hui prouvée. Un enfant entouré, accompagné de sa ou ses figures d’attachement durant ses trois premières années, est un enfant qui se développera de façon plus équilibrée et ce n’est pas moi qui le dit, évidemment. Alors oui, certains peuvent entendre l’argument d’une « meilleure rémunération » et je peux le comprendre, mais quand on parle de réduire la durée du congé, je pense que nous faisons erreur. Certains pays comme l’Espagne ou les pays scandinaves ont prouvé l’efficacité d’un congé équitable. 

Pourquoi ne pas s’en inspirer ?”

Laetitia, elle, exprime une perspective intéressante en suggérant une double approche : “Après, peut-être que pour certaines personnes ça leur permettrait de pouvoir prendre un congé parental alors qu’avant elles n’auraient pas pu, financièrement. Mais le mieux pour les parents et bébés serait de maintenir le temps tout en revalorisant l’indemnité, mais malheureusement, je ne pense pas que ce soit possible. J’ai un fils pour lequel j’ai pris un congé parental de six mois. La rémunération, c’est vraiment pas beaucoup, nous avons dû principalement vivre sur le salaire de monsieur et les économies sur mon livret A sont totalement passées pendant ce congé parental. J’ai déjà repris le travail, mais à l’époque oui ça m’inquiétait la reprise professionnelle.”

Revaloriser l’indemnité tout en maintenant une durée de congé plus longue. Cette opinion met en avant les préoccupations financières des parents tout en reconnaissant l’importance d’un temps prolongé pour le bien-être de l’enfant et des parents.

Les témoignages recueillis sur le média The helpr, illustrent une variété de préoccupations et de besoins des parents en ce qui concerne le congé parental. Les commentaires de Florian et d’Élodie mettent en évidence l’importance du temps passé avec les enfants et de l’attachement précoce. Les opinions de Barbara et de Laetitia reflètent les défis financiers et les aspirations à une meilleure rémunération.

Les témoignages révèlent également les défis pratiques auxquels sont confrontés les parents, tels que le manque de solutions de garde et la nécessité de maintenir des revenus stables pendant le congé parental. 

ll est important de souligner que si les visions partagées par nos témoins soulignent la complexité de cette réflexion, un autre échantillon de parents interrogés par Marianne approuve plutôt l’idée, mais à une condition. La création de places supplémentaires en crèches est sur la balance. 56% des parents s’occupent eux-mêmes de la garde de leur nouveau-nés, seulement 36% d’entre eux ont le choix. “Il y a un écart significatif entre les attentes des familles et l’offre existante”, constate Michel Villac, à la tête du Conseil de la famille du HCFEA. 

Comme le souligne l’enquête Travail et parentalité, trois champs d’action peuvent changer le défi actuel des parents. Le rôle de l’Etat est critique pour mettre en place des dispositifs éclairés, encore faut il que les acteurs économiques comme les entreprises permettent leur application de manière ouverte et sans tabou et que les parents en tant qu’individus s’en emparent dans la durée. 

Les les effets de bord de ce type de dispositif peuvent par exemple de creuser les écarts au travail entre les salariés H/F, d’accentuer le burn-out parental pour ceux n’ayant pas de relai, ou de mettre en difficulté le lien d’attachement avec l’enfant comme le relevaient les témoignages des parents cités plus haut. 



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